Zaira Zoccheddu: la fille de l'ombre
Un nom étrange sur lequel il est bien difficile de mettre un visage, un nom souvent aperçu au détour d'un générique sans réellement savoir à quel personnage il correspond. Enigmatique elle l'est et le restera. Venue à Rome pour goûter à la célébrité et réaliser son rêve, devenir comédienne, cette ancienne participante aux concours de Miss n'a malheureusement jamais vraiment rencontré le succès si convoité, encore moins vu son souhait être exaucé. Condamnée à l'ombre qui a fini par l'absorber nous allons tenter de percer le mystère de cette jeune actrice qui tomba même dans l'infamie du hardcore et retracer son parcours chaotique, un bel hommage que nous rendons aujourd'hui à la brune Zaira Zoccheddu.
Née en Sardaigne en 1956, Zaira va assez rapidement quitter sa région natale pour s'installer à Rome afin de réaliser un de ses plus grands rêves: devenir actrice. Afin de subvenir à ses besoins, la jeune fille va travailler quelques temps dans un salon de coiffure. En 1974, alors tout juste âgée de 18 ans, Zaira fait son entrée dans la lumière. Elle va en effet représenter au pied levé l'Italie au concours de Miss Italie, la titulaire du titre ayant décidé de ne plus y participer. En 1975 Zaira se présentera au concours de Miss Europe. Il n'en faut pas plus pour que la jeune femme se fasse remarquer des agents et producteurs. C'est ainsi qu'elle fait ses grands débuts à l'écran en 1976 dans Brigade spéciale / Roma a
mano armato de Umberto Lenzi. Elle n'y fait qu'une brève apparition, celle d'une otage qui hurle, mais ce petit rôle de simple figurante, va en quelque sorte refléter ce que va être la future carrière de la jeune comédienne en herbe. En effet, si Zaira va en tout et pour tout tourner dans une trentaine de films étalés sur une quinzaine d'années, elle ne décrochera jamais de premiers rôles. Elle devra se contenter de personnages de second voire troisième ou quatrième plan lorsque ce n'est pas de la simple figuration, parfois non créditée. L'amateur pourra donc s'amuser à tenter de la repérer ça et là, la plupart du temps dans des oeuvres érotiques où elle expose ses charmes, impudique.
Elle est ainsi la jeune fille des flashes-back de Inhibition, une des prisonnières obligéede se déshabiller dans La svastica nel ventre de Mario Caiano, une déportée juive de Erica tigresse du désert dans lequel elle a une belle scène d'amour avant d'apparaitre au générique de la comédie musicale pour adultes Symphonie of love / Proibito erotico de Luigi Batzella aux cotés de Karin Well, Marina Daunia et Ajita Wilson et Porca societa de Luigi Russo avec Luciano Bartoli et Jeanne Mas (!) avant qu'elle ne devienne une des stars de la variété française dans les années 80. Guère plus conséquents seront ses rôles dans L'italia in pigiama de Guido Guerrasio et No alla violenza de Tano Cimarosa aux cotés de Ninetto Davoli et Al Cliver dont elle joue l'épouse. Non créditée, on la repère brièvement en 1976 dans Un amore targato forli et Il secondo tragico Fantozzi. Parallèlement à ses premiers pas devant la caméra, Zaira est également l'héroïne de quelques romans-photo à l'eau de rose, un type de média alors fort à la mode en Italie.
En 1977 elle fait un caméo non crédité dans le médiocre Les folles nuits de Caligula de Roberto Montero Bianchi , une des nourrices qui donnent le sein aux enfants, puis se retrouve au générique de L'albero della maldicenza avec Marc Porel (la femme adultère exécutée) et La casa dell'amore, la polizia non puo intervenire de Polselli, un polar aux limites du hardcore.
Et c'est bel et bien vers un érotisme de plus en plus osé que Zaira va s'orienter dés le début des années 80 avant de pénétrer l'univers du hardcore transalpin.
Elle est ainsi dés 1980 à l'affiche des Petites sauteuses en vacances / I porno amori di Eva avec notamment Guia Lauri Filzi suivi en 1981 de Gocce d'amore de Giovanni Leacche où elle retrouve tout le gratin du hardcore italien d'alors: Sabrina Mastrolorenzi, Pauline Teutscher, Alfonso Gaita, Pino Curia et bien entendu Guia Lauri. Cette même année, elle pose nue pour l'édition italienne de Play boy pour son numéro de mai qui la présente
comme une possible future star de cinéma. La prévision ne se réalisera pas vraiment puisque Zaira continue à être cantonnée dans des oeuvres d'exploitation à forte connotations érotiques. Elle se retrouve à l'affiche des deux WIP de Edoardo Mulargia réalisés conjointement, Les évadées, elle est Lucy une des malheureuses détenues condamnées aux travaux forcés au beau milieu de la jungle, et La fin des tortionnaires du camp d'amour 2 dans lequel elle est Muriel, la compagne de cellule de Ajita Wilson avec qui elle partage une brûlante scène saphique. On la retrouve ensuite dans un nouveau hardcore signé cette fois Lorenzo Onorati, Perversions très spéciales pour jeunes filles de bonnes familles / Lea avec une fois de plus l'élite du genre: Marina Frajese, Erminio Bianchi Fasani, Brunello Chiodetti, Laura Levi et Catherine Ringer.
Zaira passera le reste de la décennie à se déshabiller et jouer les éternelles figurantes notamment dans Febbre a 40! où elle est une modèle aux cotés de Marina Frajese lors d'une séance photo. Dans Le maître du monde de Alberto Cavallone, méconnaissable, elle est un membre de la tribu. Elle fait un caméo non créditée dans Hercules de Luigi Cozzi, apparait dans Mizzica... ma che é proibitissimo, Impariamo ad amarci, le sexo mondo de Antonio D'Agostino Noi e l'amore comportamente sessuale variante et Sotto il vestito niente, le giallo des frères Vanzina dans le rôle d'une exhibitionniste / voyeuse qui se masturbe sur son lit. En 1987, elle interprète une voyante lubrique et prostituée dans le très drôle La croce dalle 7 pietre. Elle y a une scène d'amour avec Marco Antonio Adolfi avant qu'il ne se transforme en loup garou et la tue. Son ultime prestation au cinéma, une prostituée qui aguiche Tini Cansino dans un bordel, semble être en 1989 dans Arrabella l'angelo nero.
Zaira va alors disparaitre sans réellement laisser de traces. Si elle réapparait sur les écrans en 2007 dans Riecco Aborym ce n'est qu'à travers quelques scènes empruntées à La croce dalle 7 pietre. Il semblerait que Zaira ait repris son premier métier, celui de coiffeuse, quelque part à Rome mais sans aucune certitude. Malgré ses tentatives d'élections au titre de Miss, ses participations à quelques romans-photos et ses premiers balbutiements pourtant remarqués devant la caméra, Zaira n'a jamais accédé à la notoriété, encore moins réalisé son grand rêve, celui d'être une véritable actrice, condamnée à l'ombre et au statut d'éternelle figurante dans des oeuvres plus dégradantes que gratifiantes. Qui se souvient de Zaira si ce ne sont ses admirateurs somme toute assez nombreux encore aujourd'hui? Voilà une bien jolie récompense car elle vient du coeur, celui de son public. Zaira nous t'aimons!