Un tranquillo matrimonio di provincia
Autres titres: Augh! Augh!
Réal: Marco Toniato
Année: 1980
Origine: Italie
Genre: Comédie dramatique
Durée: 88mn
Acteurs: Andrea Occhipinti, Fabiola Toledo, Duilio Del Prete, Cochi Ponzoni, Laura Trotter, Diana De Curtis, Renata Zamengo, Andrew Lord Miller, Alina De Simone, Mario Bardella, Franco Turi, Remo Remotti, Marisa Salli, Donatella Vetraino, Giorgio Trestini, Paolo Montesi, Raul Cabrera...
Résumé: Danilo, un jeune homme d'une vingtaine d'années, revient dans son petit village natal après être parti plus de trois ans. Bien des choses ont changé depuis. Ses parents sont morts, son arriviste de frère a repris la fabrique familiale et la belle Simona s'apprête à épouser le riche comte Orsini, un mariage de convenance qui ne plait guère à Danilo le vagabond épris de liberté...
S'il est bien des films mystère Augh! Augh! en est un parfait exemple. Premièrement de par son réalisateur, Marco Toniato, dont on ne sait pratiquement rien si ce n'est que c'était son tout premier film. Il ne réapparaitra que sept ans plus tard, en 1987, aux commandes d'un porno, La lingua, avant de disparaitre définitivement de la circulation. Deuxièmement le film lui même est une petite énigme. S'il serait sorti en Italie à l'automne 1980 il semblerait qu'il n'ait été distribué furtivement que dans quelques petites salles de province avant de s'évaporer nul ne sait où. Il ne refit surface que bien des années plus tard via une édition
vidéo italienne éditée chez Stardust video devenue aujourd'hui rarissime, une véritable pièce pour collectionneurs assidus. Le film a ainsi longtemps été considéré comme perdu avant qu'il ne ressurgisse grâce aux miracles du web où traine une copie passable, seul moyen à ce jour de découvrir cette petite comédie dramatique loin d'être mauvaise contrairement à ce qu'on pourrait croire. Mais de quoi peut bien parler un film doté d'un tel titre?
Danilo, un garçon d'une petite vingtaine d'années, revient dans son village natal après plus de trois ans d'absence passés à parcourir le pays en vagabond. A son retour bien des choses ont changé. Il s'installe chez son frère aujourd'hui marié à la belle Irma. En
cherchant ses parents il apprend qu'ils sont morts depuis déjà bien longtemps. Son frère ne l'a pas prévenu. Furieux il lui met son poing dans la figure. Leur relation ne va pas s'arranger lorsqu'il apprend de sa bouche qu'il les a laissé mourir dans un hospice afin de reprendre la fabrique familiale. Danilo va séduire Irma pour se venger mais c'est surtout de Simona qu'il est depuis longtemps amoureux. Malheureusement pour lui Simona a elle aussi bien changé depuis son départ. Elle va se marier au richissime comte Orsini, un mariage arrangé auquel la mère de la jeune fille tient beaucoup. Simona n'éprouve aucun sentiment pour le comte et n'a que faire de son argent. Au fond d'elle elle aime toujours Danilo. Le jour
des noces Danilo va à sa façon interrompre le mariage.
Augh! Augh!. Bien stupide est cette onomatopée qui sert de titre au film, très loin de représenter cette comédie douce amère dont le titre secondaire est bien plus parleur, Un tranquillo matrimonio di provincia (Un tranquille mariage provincial), puisqu'il cible le coeur même de l'intrigue. Augh! Augh! n'est en fait que le cri que lance Quartin la clocharde en croisant Danilo à son retour au village. L'histoire de ce mariage des campagnes n'a rien de très originale. Ce n'est jamais qu'une énième version du jeune paltoquet amoureux d'une jeune fille promise à un noble plus par intérêt que par amour. Mais sur cette base des plus
classique Toniato réalise une petite bande non seulement sympathique et pleine de charme mais assez personnelle, presque intimiste. Il y décrit la vie d'un petit village indéterminé situé quelque part dans la campagne vénitienne qui vit au rythme des préparatifs du mariage du comte et de la jeune Simona troublés par le retour de Danilo, un garçon du pays qui a choisi une vie de nomade. Au delà du mariage c'est bel et bien Danilo le point central du film qui se voudrait une ode à la liberté non seulement de choisir mais celle également qui vient bouleverser les conventions, celle qui dérange et vient bouleverser les traditions, les habitudes, la vie routinière et par dessus tout la rigidité des mentalités qui subsiste
encore dans les villages de campagne. Danilo est à sa façon un rebelle, un hippie moderne, un contestataire à la mentalité encore adolescente (dans le bon sens du terme) qui à une vie bien installée préfère parcourir le monde en stop, libre de toute contrainte. Ses amis sont d'aimables pochetrons (la Quartin et Pachyderme), il se lave lorsqu'il le veut bien, préfère une vérité bien sentie que l'hypocrisie et fait l'amour quand bon lui semble. Point étonnant d'une part qu'il soit le mouton noir de la famille et soit sans cesse en grippe avec son frère, un arriviste qui n'a pas eu peur de laisser mourir leurs parents dans un hospice pour hériter de la petite entreprise familiale, d'autre part que son retour ne soit pas forcément bien vu de
tous notamment de la bourgeoisie (le comte) dont il est l'antithèse.
Le discours est intéressant mais il manque franchement d'épaisseur et ne fonctionne donc pas vraiment. Toniato n'est pas à la hauteur de ses ambitions et les idées tombent quasiment toutes à l'eau. Ce manque de profondeur ainsi que la psychologie des protagonistes réduite à son maximum nuit à l'ensemble. Difficile dans ces conditions de s'attacher aux personnages, d'éprouver une quelconque émotion tant Toniato reste superficiel. Opter pour une certaine légèreté ne signifie pas forcément donner dans la superficialité. Malgré ses défauts Un tranquillo matrimonio di provincia possède un charme
certain. On se laissera séduire par ce petit village de Vénétie baigné de soleil, ses habitants pittoresques, son âme tout simplement, le coté naïf de l'histoire, l'absence de toute vulgarité, l'équilibre plutôt réussi entre le rire et la sensualité et les quelques plans de nu que certains jugeront gratuits mais qui viennent flatter l'oeil. Dernier atout la jolie partition musicale aux accents français (l'accordéon) signée Pino Donaggio ainsi que la jolie chanson très rock du générique "Arrivano gli indiani" chantée par Massimo Laurora. Plutôt inattendue est la distribution mais c'est là encore un bonus. Dans le rôle de Danilo on retrouvera un tout jeune et si séduisant Andrea Occhipinti dont c'était le tout premier film après une brève
apparition non créditée dans Zio Adolfo in arte Führer (il était Hitler étudiant aux Beaux-Arts). Outre ses chemises hippie qu'il est impossible de ne pas remarquer, son naturel, sa simplicité Andrea nous gratifie de quelques plans de nudité intégrale tant frontale que dorsale qui mettent en valeur cette virilité qu'on a tellement souhaité découvrir. Autour de lui gravitent Duilio Del Prete (le comte), Fabiola Toledo et Laura Trotter (respectivement Simona et Irma) qui elles aussi dévoilent décemment leurs charmes et Renata Zamengo (Quartin).
Film d'amis (comme le précise le générique) réalisé sans quasiment aucun budget Augh!
Augh! ou plus explicitement Un matrimonio tranquillo di provincia est une petite comédie dramatique légère qui malgré sa superficialité demeure un spectacle plutôt attachant de par sincérité et son coté humain, une petite tranche de vie tranquille et provinciale, les deux mots clés qui pourraient résumer cette gentille hymne à la liberté (ou doigt d'honneur aux conventions). Voilà une rareté qui devrait réjouir l'amateur, en espérant qu'un jour le film de Marco Toniato refasse surface afin d'être (re)découvert dans de bien meilleures conditions.