La herencia del mal
Autres titres: La mansion del terror / The evil's heritage
Real: Joaquin Gomez Sainz
Année: 1987
Origine: Espagne
Genre: Thriller horrifique
Durée: 93mn
Acteurs: David Rocha, María Vico, Frank Braña, Remedios Hernandez...
Résumé: Un jeune gigolo, Tony, blessé par les hommes à qui il doit de l'argent, est recueilli par Greta, une vieille fille qui habite seule avec son père et leur homme à tout faire dans un château. Greta tombe vite amoureuse du garçon qu'il décide d'épouser après lui avoir annoncé qu'elle était très riche. Elle en fait également son héritier direct. Tout cela n'est guère du gout de son vieux père et du domestique. Malheureusement Greta meurt dans un incendie. Tony prend possession du manoir et en fait un lieu de débauche où il fait venir des prostituées. Toutes meurent étranglées par un mystérieux assassin ganté de blanc. Tony est loin d'imaginer le terrible secret qui se tapit derrière les murs du château...
Dés l'aube des années 80 le cinéma de genre italien commença lentement à décliner avant de connaitre une interminable agonie qui se prolongea jusqu'à la fin de la décennie. Son homologue ibérique suivit plus ou moins le même chemin, La herencia del mal n'en est qu'un triste aperçu.
Plus connu pour la version espagnole de Conan qu'il mit en scène en 1983, l'inénarrable et formidablement mauvais Tunka el guerrero, l'acteur Joaquin Gomez Sainz réalisa en tout et pour tout quatre films dont La herencia del mal, inédit sous nos cieux.
Après avoir été sérieusement blessé par ses créanciers mené par le peu recommandable Da Silva, un jeune gigolo, Tony, est recueilli une nuit par Greta, une châtelaine d'un certain âge. Elle soigne ses blessures et lui offre l'asile dans son manoir. Vieille fille, Greta vit seule avec son vieux père, un ex-officier allemand qui idolâtre toujours autant Hitler, et leur homme à tout faire, Hans. Greta tombe très vite amoureuse de Tony et le demande en mariage après lui avoir annoncé qu'elle en fait son héritier. Cette nouvelle déplait fortement à son père mais également à Hans, qui a toujours secrètement aimé la châtelaine. Rongé par la jalousie, coupable de rêves inavouables, Hans prend sur lui. Tony accepte la demande en mariage
malgré la répulsion que lui inspire cette vieille fille. Seule l'idée d'être bientôt immensément riche lui donne le courage de lui faire l'amour. Malheureusement Greta trouve la mort dans un incendie. Le jeune homme se remet très vite de son deuil et commence à transformer le château en un lieu de débauche. La plupart du temps ivre, il invite chaque nuit des prostituées. Excédés par le comportement de ce gigolo qu'ils ont toujours détesté, le père de Greta et Hans décident de prendre les choses en main. Très vite toutes les filles de joie que Tony ramène au manoir sont étranglées par une mystérieuse silhouette gantée de blanc tandis que de son coté Da Silva est bien décidé à récupérer l'argent que Tony lui doit. Il paie
trois putains pour attirer le garçon dans un piège mortel. Une fois au château, elles lui injectent un poison qui le paralyse lentement. Pour avoir l'antidote il doit payer outre ses dettes remettre sa fortune à ses créanciers. Alors qu'il agonise dans d'atroces souffrances, le château va révéler son abominable secret. Le tueur aux gants blancs fait son apparition, tuent les trois filles avant de mettre le feu à l'ancestrale demeure d'où personne ne sortira vivant.
Une paire de gants blancs manipule le carton sur lequel s'inscrit le générique d'ouverture avant qu'il ne prenne feu juste après qu'une réflexion philosophique nous ait expliqué la
noirceur de l'âme humaine. Voilà qui pourrait résumer ce film qui mange un peu à tout râteliers. Bande fantastique mâtinée d'horreur tendance gothique, vengeance d'outre tombe, hommage aux gialli par le biais d'un meurtrier ganté non pas de noir, c'est amusant, mais de blanc, film sur le proxénétisme et le trafic de drogue, thriller psychologique où se mêlent sadisme et perversion agrémenté d'une touche malsaine de nazisme, il est assez difficile de classer La herencia del mal qui ainsi présenté a tout pour séduire l'amateur d'oeuvres fétides à l'ambiance lugubre. Force est malheureusement de constater que le film est un échec retentissant et n'engendrera qu'ennui et fous rires chez le spectateur déconfit par une telle absurdité.
Citer les défauts de cette petite pellicule est particulièrement fastidieux tant ils sont nombreux. En premier lieu Gomez ne parvient à aucun moment à créer une quelconque atmosphère encore moins à profiter de ce sinistre château se dressant dans la campagne qui sert de cadre à cette histoire décousue. Gomez avait pourtant là un décor de rêve (ou de cauchemar) qui aurait pu donner à l'ensemble un fort séduisant coté gothique. Il échoue lamentablement et ce ne sont pas ses personnages qui apporteront une once d'angoisse au film qui s'enlise pitoyablement dans a plus totale absurdité. Ce ne sont que des esquisses sans âme qui interprètent leur rôle de manière machinale. L'homme à tout faire se veut
inquiétant mais balourd, il n'est jamais très crédible. Greta est étonnamment translucide. Quant à son vieux père, un être rabougri, décharné et paralytique, il fait certes effet mais dés qu'il retombe dans ses obsessions nazies, il devient vite stupides. Entourés de photos du Fürher et de croix gammées qui ornent ses pauvres murs quasiment nus, il écoute des chants allemands tout en nettoyant ses armes. Pour qui pourquoi, comment... on ne le saura jamais car son passé nazi n'a aucune incidence sur l'intrigue. Il vient se poser là comme une mouche sur une table juste pour donner dirait-on une aura sulfureuse au film. Gomez tente vainement de créer quelques liens sulfureux entre eux mais privé de toute explication et
psychologie, ce sont plus des interrogations qui envahissent le spectateur qu'un insidieux malaise.
Tout va vite, très vite, l'intrigue défile vitesse grand V, défiant toute logique ou cohérence. A chaque nouvelle séquence on a la désagréable sensation d'avoir loupé un épisode. Si cela est encore acceptable durant la première partie, cela devient sidérant lors de la seconde moitié. La herencia del mal se transforme alors en un gigantesque n'importe quoi. Dés la mort de Greta décédée dans un microscopique incendie, Tony invite des prostituées à venir passer la nuit au château. On assiste alors à un défilé de filles un peu comme on assiste à
un défilé de mode, de minuscules scènes qui s"enchainent les unes aux autres sans qu'il ne se passe jamais rien. On reste ébahit devant un tel vide mais c'est sans surtout sans voix, ébaubi qu'on demeure lorsqu'elles se font tuer toutes de la même façon (mollement étranglées avec une ficelle) et disparaissent sans que jamais Tony ne se demande où elles sont lorsqu'il regagne la chambre où ils les a laissé. Encore plus fort, il n'est même pas étonné d'avoir été assommé au milieu de son salon. Un moment de bravoure inégalable!
Gomez brouille bien sûr les pistes mais en vain, tout est prévisible, aussi transparent qu'une vitre, si énorme que ses tentatives deviennent risibles. La dernière partie du film semble être
entièrement improvisée. Dénuée de toute mise en scène, elle accumule les non sens, les âneries au rythme des cris et contorsions du pauvre David Rocha, en complète roue libre. On le devine perdu, mal à l'aise, en pleine exagération jusqu'à ce qui devait être le clou du film, le final et sa surprenante révélation, l'identité du tueur et le secret du château. Très mal amenée, cette découverte vaut son pesant d'or. Gageons que le spectre hideux de cette chère Greta peu heureuse de la conduite de son jeune amant sera source de bien des rires. Il ne faut pas s'attendre à une quelconque explication comme il ne faut guère chercher à comprendre pourquoi tout le monde meurt. Il fallait simplement mettre fin à ce désastre.
Quant au gore que les slogans publicitaires annonçaient on devra se contenter en fait d'une hache en plein visage, d'une main tranchée et... absolument rien d'autre!
S'il faut trouver des excuses à Gomez, il faut savoir que le tournage et la production du film furent particulièrement mouvementés et durent même être interrompus. A court d'argent, Gomez fut obligé de le financer de sa poche pour pouvoir le terminer avec les moyens du bord. Cela pourrait expliquer l'aspect gruyère de la pellicule et l'absurdité de l'ensemble notamment de la fin. Mieux aurait il fallu ne pas le sortir! Il fut d'ailleurs distribué en Espagne que huit ans après sa réalisation.
Aux cotés des vétérans Frank Brana, figure récurrente du western-spaghetti, et Maria Vico on retrouvera le jeune David Rocha découvert quelques années plus tôt dans El asesino de munecas. Véritable icône dans l'Espagne des années 70 habituée aux rôles sulfureux David fut entre autres à l'affiche de Cet obscur objet du désir et surtout El ultimo pecado de la burguesia avant de devenir un temps un récurrent des films de Naschy. Si dans La herencia del mal, un film dont il ne souhaite guère se souvenir, il n'apparait pas nu, David nous offre tout de même un plan en slip blanc et arbore toujours ses pantalons moulants dans lesquels son entre jambe semble être au bord de l'explosion. Si c'est pour David son plus
mauvais rôle au cinéma, crispé, mal à l'aise, largué, ce sera aussi son ultime apparition à l'écran avant de devenir un grand nom du doublage dans son pays natal.
Joaquin Gomez quant à lui s'octroie le rôle de Da Silva. Pour le reste du casting, il semblerait que le cinéaste ait choisi les (pseudo?) actrices les plus laides que le cinéma espagnol pouvait alors compter. En cela, La herencia del mal forme un tout.