Amore e morte nel giardino degli dei
Autres titres: Love and death in the garden of the gods / Amor y muerte en el jardin
Real: Sauro Scavolini
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Thriller
Durée: 85mn
Acteurs: Franz Von Treuberg, Erika Blanc, Ezio Marano, Peter Lee Lawrence, Orchidea De Santis, Vittorio Duse, Carla Mancini, Bruno Boschetti, Rosario Borelli...
Résumé: Azzura et Manfredi sont frère et soeur. Orphelins, ils n'ont jamais connu leurs parents. Ils ne se sont jamais quittés depuis l'enfance jusqu'à développer une relation complice particulièrement trouble et surtout incestueuse. Cette relation va prendre fin lorsque Azzura épouse Timothy, un pianiste, plus pour échapper à son frère que par réel amour. Pourtant la jeune femme souffre et son frère lui manque. Fou de jalousie, Manfredi feint de partir pour les Indes mais il s'est isolé dans un appartement où il vit avec une amie, Viola. Lorsque sa soeur découvre la vérité, la jalousie s'empare d'elle également. Désespérée, incapable de vivre une vie normale sans son frère, elle se suicide mais Viola la sauve de la mort. La jeune fille tombe alors amoureuse de Azzura avec qui elle entretient une relation saphique. La relation entre le frère et la soeur se détériore de plus en plus. Tous deux sombrent dans une folie irréversible qui les conduira vers une fin aussi tragique que sanglante...
Souvent classé parmi les gialli, le seul et unique film de Sauro Scavolini, le frère de Romano ici à la photographie, est en fait beaucoup plus une tentative de thriller psychologique particulièrement malsain qui mélange quelques uns des thèmes les plus en vogue dans le cinéma de genre de ce début d'années 70 dont l'inceste, l'érotisme morbide, la folie, la psychanalyse, le saphisme, les relations tortueuses entre différents personnages tout aussi torturés et l'horreur pour son final sanglant.
Amore e morte nel giardino degli dei fait partie de ces films devenus rares au fil du temps mais qui n'en font pas moins partie de ces chef d'oeuvres méconnus, ces petits trésors du cinéma d'exploitation italien, tant pour leur complexité que pour que leur coté particulièrement morbide. Ceux qui attendent d'un thriller action et tension risquent d'être fortement déçus cette fois puisqu'il ne se passe strictement rien durant quasiment plus d'une heure jusqu'aux vingt dernières minutes particulièrement inattendues et sanglantes, les plus fameuses de ce thriller psychanalytique, à la fois trouble, maladif et fascinant. Au rythme et au suspens, Scavolini préfère créer tout au long du film une atmosphère de mort et de décadence presque nauséabonde afin d'installer un réel malaise qui ira crescendo au fur et à mesure qu'on découvrira les méandres d'une relation interdite entre deux personnages apparemment liés par le sang qui depuis longtemps ont sombré chacun à leur façon dans une sorte de folie latente qui ne demande plus qu'à exploser.
Véritable oeuvre introspective, Amore e morte nel giardino degli dei prend pour base les rapports incestueux qu'entretiennent un frère et une soeur, Azzura et Manfredi, depuis leur plus tendre enfance. Orphelins, ils ne se sont jamais quittés et ont tissé au cours des années une relation quasi amoureuse extrêmement forte qui les lie à jamais tout en développant de façon sournoise une sorte de douce folie. A partir de là, Scavolini va mettre sur pied une histoire particulièrement alambiquée où les rapports vont de plus en plus se
compliquer, se brouiller et la folie éclater au grand jour dés lors que Azzura se marie afin de se libérer du moins en apparence de cet amour incestueux et que Manfredi s'éprend de Viola, une amie qui entretiendra une relation saphique avec Azzura après l'avoir sauvé du suicide. C'est sans compter un surprenant rebondissement puisque le jeune homme va découvrir qu'en fait il a été adopté après que le véritable frère de Azzura soit mort-né. Découvrir qu'ils n'ont jamais eu aucun lien de parenté va lui faire perdre définitivement l'esprit et seule la mort désormais pourra mettre un terme définitif à la folie de ces deux êtres depuis longtemps perdus.
Si Amore e morte nel giardino degli dei peut être vu comme une énième tentative d'illustrer la décadence, l'agonie de la bourgeoisie, source de vices et de perversions de toute sorte, le film de Scavolini est avant tout un puissant drame psychologique qui suinte le désespoir, la mort et le délabrement des âmes qui se désagrègent à l'image des superbes décors, cette splendide villa abandonnée noyée au milieu de tout aussi splendides jardins qui semblent abriter toute la misère d'un passé inavouable, ces ruelles désertes semblables à des ruines qu'arpentent Azzura en quête de son frère. Nait très vite un étrange malaise, une atmosphère suffocante, morbide rythmée par les bandes magnétiques sur lesquelles Azzura a enregistré ses séances de psychanalyse. C'est là l'originalité du film. Tout est filmé en un long flash-back porté par ces bandes que le vieux ornithologue venu se retirer dans la villa a découvert au pied d'un arbre. Il fait alors comme par magie un voyage dans le temps et découvre avec angoisse le terrible drame d'Azzura qui jour après jour a enregistré ses visites
chez son psychanalyste afin de lui confier non seulement sa détresse mais surtout de lui raconter ses rapports d'amour-haine, d'amour-répulsion avec Manfredi. Il y découvre son tourment, ses relations incestueuses, leurs jeux aux limites parfois du sadomasochisme, cette attraction irrésistible mais contradictoire qui dure depuis l'enfance à laquelle elle aimerait désormais échapper sans réellement pourtant le vouloir. La découverte d'une seconde bobine déposée par un inconnu venu s'introduire dans la villa fera réaliser au scientifique l'incroyable folie dans laquelle ces deux êtres perdus ont sombré après le mariage de l'un et l'arrivée d'une amie intime de l'autre. Cela permet à Scavolini quelques séquences particulièrement macabres notamment celle d'un cauchemar où Azzura voit un chien dévorer les membres sanguinolents d'un cadavre découpé en morceaux.
Particulièrement lent, dépourvu de tout rythme, Amore e morte nel giardino degli dei se permet une envolée sanglante et étonnamment cruelle lors des vingt dernières minutes lors d'un final aussi tragique qu'original qui conclura ce film de manière certes désespérée, inévitable mais dans un sens salvateur pour les deux protagonistes.
Filmé avec style et surtout justesse, ce thriller atmosphérique doit également beaucoup à ses deux interprètes principaux, Erika Blanc, troublante, émouvante, qui trouve là son rôle le plus fort et peut être le plus audacieux, et l'ex- spécialiste du western spaghetti, l'allemand Peter Lee Lawrence tout aussi excellent. On notera la présence de Orchidea De Santis dans la peau de Viola qui nous offre de superbes nus intégraux.
Troublant, morbide, maladivement malsain, Amore e morte nel giardino degli dei est un thriller psychologique fascinant, sordide, à la limite du film d'auteur, qui rappelle les oeuvres de Eriprando Visconti. Bercé par une partition musicale inquiétante, Scavolini a réalisé un film très personnel, original, introspectif, parfois glacial, un de ces petits bijoux perdus du cinéma déviant qui s'articule autour de la complexité des sentiments qui mène parfois à la folie. A découvrir de toute urgence par tous les amateurs de cinéma maladif très spécial.