Bora Bora
Autres titres:
Real: Ugo Liberatore
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Drame / Erotique
Durée: 90 mn
Acteurs: Haydée Politoff, Corrado Pani, Doris Kunstmann, Rosine Copie, Antoine Coco Puputauki, Giovanni Ivan Scratuglia...
Résumé: Roberto est marié à Margaux. Celle ci après leur divorce est partie en vacances à Bora Bora et n'a plus donné de nouvelles. Roberto part donc pour Tahiti tenter de retrouver la jeune femme et de la reconquérir. Une fois sur l'île il rencontre Susan, une suédoise, propriétaire d'un musée, qui semble être la seule à savoir où se trouve Margaux. Nymphomane, Susan a une aventure avec Roberto et finit par lui avouer où se trouve son épouse. Margaux a décidé de rester sur Bora Bora, loin de la civilisation et de ses problèmes existentiels. Elle s'est remariée avec un indigène, Mani. Roberto va essayer de la convaincre de rentrer mais il se laissera séduire par cette vie libre de toutes contraintes. A travers une sexualité elle aussi très libre les deux époux vont renouer contact mais au bout du chemin il leur faudra faire un choix décisif...
Second film du réalisateur Ugo Liberatore Bora Bora au même titre que Il sesso degli angeli, son premier essai cinématographique, peut être considéré comme l'ancêtre du film exotico-érotique transalpin. En ce sens, le film fait figure de pionnier et de là tire une grande partie de son importance aujourd'hui aux yeux du spectateur amateur de ce type d'oeuvres qui allait prendre toute son ampleur dés le milieu des années 70.
Avouons le de suite, il n'y a pas grand chose à écrire sur Bora Bora puisque comme la plupart de ce genre de films, le scénario est fort mince et se contente de reprendre inlassablement les mêmes thèmes. On retrouve donc une fois de plus un couple en crise qui en quittant notre monde civilisé pour un Eden terrestre, ici Tahiti, a cru pouvoir résoudre ses problèmes existentiels en tentant de vivre parmi les indigènes de Bora Bora.
Autant dire qu'il ne se passe pas grand chose durant les 90 minutes que dure le film cependant Bora Bora reste captivant d'un bout à l'autre et se transforme vite en un véritable charme éveillé. Nous sommes tout simplement devant un magnifique film de vacances où Liberatore nous fait visiter et parcourir l'île de long en large. Mer transparente, flots bleus, ciel azur, sable blanc, cascades et forêts enchanteresses, criques et palmeraies où foisonnent les orchidées, vahinés et danses exotiques, c'est dans ce décor que ce jeune couple va essayer de se retrouver, se comprendre au rythme d'un érotisme léger, aussi léger que le souffle du vent qui balaie l'onde cristalline. Vu sous cet angle Bora Bora est un pur dépaysement et bien peu ne se laisseront pas aller à rêver. C'est là la grande force du film.
Pour le reste, Liberatore a ici imposé les bases du genre. Il y a l'indispensable couple en crise, Roberto et Margaux qui à travers ce refuge illusoire qu'est la liberté sexuelle, l'amour libre, vont essayer de résoudre leurs problèmes. A ce couple s'ajoute une jeune suédoise nymphomane, Susan, qui d'une certaine manière illustre cette fameuse liberté des sens et de la sexualité propre non seulement à ce genre cinématographique spécifique mais également à la vie sous les tropiques, un mode de vie et de pensée souvent inaccessible aux occidentaux. Ce sont sur ces bases que reposera ce riche filon et donc tout le film.
Susan a fait ce choix comme Margaux qui elle s'est remariée dans les profondeurs de l'île, acceptant un monde et des valeurs différentes. Mais ces choix paraissent souvent au bout d'un certain temps soit illusoires soit tragiques et dans un sens la sexualité devient frustration. Roberto et Margaux parviennent à communiquer avec la population locale à travers le sexe et ses divers rites. Ils tentent ainsi de lui ressembler et de se fondre dans ses coutumes pour ne faire plus qu'un avec elle mais ce sera un échec, un dramatique échec.
Fort pessimiste, la conclusion tente de signifier que s'aligner sur un mode de vie qui n'est pas le nôtre est un dangereux mirage, que l'homme ne peut survivre que parmi ceux qui lui ressemblent.
Si on pourra parler alors de moralisme voire de racisme et de pragmatisme Bora Bora est surtout d'un manichéisme évident. L'Homme blanc incapable de s'adapter à une culture autre est un élément destructeur pour l'indigène, l'Homme noir, à qui il veut imposer la sienne. L'idée d'un Paradis tropical n'est qu'un mirage puisqu'il ne peut que se transformer en Enfer pour les deux parties.
Outre la beauté de la Polynésie, on admirera le couple que forment Corrado Pani et Haydée Politoff, tous deux radieux, deux sex symbol qui se retrouveront l'année suivante dans le tout aussi solaire Interrabang. Bora Bora lança la carrière d'Haydée en Italie qui un temps se spécialisa dans ce type de films. A leurs cotés, l'allemande Doris Kunstmann, une récurrente des films de Liberatore qui connut une très longue carrière outre Rhin et fit une apparition dans les... Bronzés 3!
Bora Bora malgré un érotisme particulièrement soft tomba sous les foudres de la censure qui saisit le film à sa sortie. Si on entr'aperçoit juste un sein ça et là c'est peut être plus le coté suggestif de certaines séquences qui ébranlèrent la rigide Dame de fer notamment celle où Corrado Pani déflore une jeune vahiné de quinze ans qui s'offre à lui. Peut être fut elle aussi choquée par la mise à mort d'une tortue marine, scène assez insupportable qui n'est pas sans rappeler celle de Cannibal holocaust. Malheureusement la séquence semble avoir été retirée du très beau DVD récemment sorti.
Bercé par une très jolie partition musicale Bora Bora aussi simple soit il n'en demeure pas moins une véritable escapade tropicale, un superbe rêve éveillé qui transportera le spectateur, un cocktail multicolore en main, loin, très loin là où le soleil ne cesse jamais de se refleter dans le cristal de l'eau. Pour cela, Bora Bora mérite qu'on s'y attarde.