Torino violenta
Autres titres: Le justicier défie la ville
Real: Carlo Ausino
Année: 1977
Origine: Italie
Genre: Polar
Durée: 81mn
Acteurs: George Hilton, Emanuele Cannarsa, Giuseppe Alotta, Annarita Grapputo, Franco Nebbia, Laura Ferraro, Rino Maggio, Riggero Maggioli, Pier Giuseppe Coarrado, Cinzia Arcuri, Lorenzo Gabello, Sauro Roma, Loretta Mondino, Tonino Campa, Armando Rossi, Carlo Ausino, Regina Fabiani...
Résumé: A Turin, proie d'une criminalité chaque jour grandissante, un énigmatique justicier fait lui même justice et défie la police. Tous ignorent que le vengeur n'est autre que l'inspecteur Moretti, un flic modèle qui regrette que la police n'ait pas plus de moyens pour venir à bout de la délinquance...
Réalisateur bien peu prolifique à qui on doit d'obscurs petits films sans grand intérêt (l'amateur La villa delle anime maledette, l'insipide post nuke La citta dell'ultima paura) on doit également à Carlo Ausino deux polizeschi qui n'ont guère fait date dans l'histoire du genre. Le premier des deux est ce Torino violenta plus connu en France sous le titre assez alléchant Le justicier défie la ville.
Turin est la proie de la criminalité en tout genre. Règlements de compte entre clans mafieux,
kidnapping, hold-up, la police est la plupart du temps impuissante face à ce déferlement de violence. Le commissaire Ugo Moretti, flic exemplaire, regrette le peu de moyens dont il dispose pour mettre fin à cette criminalité. Moretti et son assistant Danieli sont également confrontés à un ange exterminateur qui la nuit hante les rues de la ville et fait lui même justice, une justice souvent expéditive. Tous ignorent que ce vengeur n'est autre que Moretti qui agit ainsi suite à une série de problèmes conjugaux.
Parmi les innombrables polizeschi sortis dès le milieu des années 70 Torino violenta parait bien insipide et se noie, disparait très vite dans une production qu'on a connu bien plus
inspirée et énergique. Ausino se contente en effet de reprendre des situations mille fois vues sans aucune originalité et surtout aucun mordant pour les accommoder à la sauce turinoise. Torino violenta voudrait marcher sur les traces des Roma et autre Napoli mais malheureusement reste loin, très loin derrière eux faute à une intrigue peu crédible, une véritable mise en scène, morne et soporifique, et une interprétation d'une étonnante mollesse. Inutile de dire que l'ennui gagne vite le spectateur qui a la désagréable impression d'assister non pas à un polar à l'italienne avec pour principal protagoniste un justicier vengeur sans pitié mais à un banal téléfilm joué sans grande conviction.
Courses-poursuites, bagarres, hold-up... tournent au ralenti et sont filmés sans aucune vitalité à croire que Torino violenta est destiné à un public du troisième âge. Quant aux comédiens ils sont à l'image du film, amorphes!
Pourtant l'affiche était prometteuse avec notamment George Hilton en tête de distribution. Rarement a t-on vu l'acteur aussi mou et peu convaincant. A aucun moment il ne donne une quelconque dimension à son personnage de commissaire-justicier qui au bout du compte n'existe pas. Ses partenaires sont tout aussi insipides de Franco Nebbia à Giuseppe Alotta en passant par la starlette Annarita Grapputo qui ne sert à rien sans parler de Emanuele Cannarsa, piètre acteur.
On ne se rattrape guère sur la violence promise par le titre original puisque celle ci est particulièrement édulcorée et les meurtres sont le plus souvent éludés ou commis hors champ.
Aussi ronflant soit il l'intérêt de Torino violenta réside ailleurs, dans sa genèse en fait. Réalisateur marginal qui n'a jamais vraiment trouvé sa place dans le cinéma italien Ausino voyait avec ce film la chance de donner enfin à sa carrière son envol grâce à une affiche d'un certain niveau, un compositeur reconnu (Cipriani), un scénario certes banal mais prometteur et une maison de production de renommée la Lark cinematografica. Le film donnait aussi à son ami de longue date Emanuele Cannarsa la chance de sa vie. Né dans les Pouilles
Cannarsa fait partie de cette génération qui est montée dans la vallée du Po afin réussir. Après trente deux ans de galère Cannarsa à travailler avec son père sur les chantiers il trouva grâce à Ausino pour qui il tourna presque exclusivement le moyen de prouver qu'on pouvait réussir sa vie en étant émigré. Grâce au réalisateur et ce film il devint une sorte d'idole, une idole des années 70 celle de toute la vallée turinoise, le symbole de la réussite aux yeux de la jeune génération qui en lui retrouvait espoir. Professeur de basket à ses heures perdues Cannarsa donne au film une forme de témoignage, celui d'une volonté de vie et de succès dans une Italie alors bien pauvre même s'il n'a guère l'étoffe d'un comédien.
Pataud, plutôt ingrat il n'est que l'ombre de l'ombre des Merli et autre Milian mais il mérite un certain respect du public. On notera la présence de Carlo Ausino qui tient un petit rôle non crédité, celui du vendeur de cigarettes assassiné,
Excepté ce moment de gloire et l'amitié entre Ausino et Cannarsa le seul autre intérêt du film est Turin elle même que le cinéaste nous fait visiter, ses rues, ses places, sa colline, le Po, le parc Valentino... Entre cette visite guidée et une amitié très personnelle voilà qui est bien insuffisant pour donner à Torino violenta une quelconque ampleur, une raison d'être, peu
aidé par l'amateurisme de l'interprétation. Si le justicier défie la ville il défie surtout ici un spectateur somnolent proche de la léthargie. Néanmoins Torino violenta jouit toujours et encore d'une jolie réputation à Turin où il est considéré comme une oeuvre importante dans le patrimoine de la ville et de sa région, régulièrement diffusé lors de manifestations et autres festivals.
Le film ayant cependant suffisamment rapporté d'argent lors de sa sortie notamment grâce à sa distribution sur Turin Carlo Ausino et Emanuele Cannarsa récidiveront en 1980 avec l'incroyablement mollasson Tony l'altra faccia della Torino violenta avec quasiment la même équipe, George Hilton en moins mais Cannarsa en tête d'affiche, avant de s'orienter définitivement par la suite vers le petit écran.