Blow job
Autres titres: La strega nuda / Soffio erotico / Dolce lingua
Real: Alberto Cavallone
Année: 1980
Origine: Italie
Genre: Fantastique
Durée: 88mn
Acteurs: Anna Massarelli, Danilo Micheli, Anna Bruna Cazzato, Valerio Isadori, Mirella Venturini, Antonio Mea, Alba Armani...
Résumé: Stefano et Diana passent une nuit à l'hôtel. Alors qu'un orage éclate, une présence malveillante erre dans les couloirs. Au matin, Stefano et Diana s'enfuient car ils ne peuvent pas payer leur chambre. Ils rencontrent Angela, une étrange femme balafrée qui les emmène dans sa lugubre villa. Angela est une sorcière qui veut que Stefano l'aide à passer "la porte". Elle jette un sort sur Diana qui tombe malade. Seule Sibilla, une jeune fille, a le pouvoir de la guérir. Stefano va vite découvrir que Sibilla est le double de Diana. Sortie d'un miroir, elle va l'entrainer dans une autre dimension. Stefano vit dés lors dans deux mondes en même temps où tout s'affronte...
Si avec Blue movie et Spell Alberto Cavallone atteignait l'apogée de sa carrière, ses films suivants connurent malheureusement une bien plus sombre destinée puisqu'ils ont pour point commun de ne pratiquement jamais avoir été distribués. Devenus pour certains quasiment invisibles, ils se sont au fil du temps transformés en une sorte de mythe autour duquel toute une aura de mystère est née. Il en va ainsi de Blow job tourné à la hâte en quelques jours après qu'un des producteurs se soit suicidé en laissant Cavallone sans argent. Il dut alors revoir son projet et le mettre en scène pour une misère.
Originellement intitulé La strega nuda, Blow job dont le titre évoque Andy Warhol pourrait être catalogué hardcore au vu de ses scènes de sexe explicites mais c'est avant tout un film d'horreur qui rend hommage au cinéma gothique italien. Intéressant, son scénario peut se scinder en deux parties. Le film débute dans un hôtel où les deux héros, Stefania et Diana, passent la nuit. Une présence maléfique erre dans les couloirs alors que l'orage gronde. On retrouve donc ici toute cette ambiance qui fit jadis la réputation du cinéma d'épouvante gothique. Ne pouvant payer leur chambre, le couple s'enfuit alors qu'une femme se suicide. Durant leur fuite, ils rencontrent une étrange femme balafrée, Angela, qui les invite chez elle.
Angela est une sorcière qui va envoûter Stefano et jeter un sort sur Diana. Seule, une jeune fille, Sibilla, peut désormais sauver Diana.
La deuxième partie du film sombre totalement dans le surréalisme. Les miroirs se mettent à vivre, les doubles prennent vie, d'étranges personnages font leur entrée dans une atmosphère parfaitement onirique jusqu'au final assez étonnant où Stefano devra se débarrasser de son cerveau, seul obstacle à la liberté totale de l'Homme.
Si Blue movie était une vision particulièrement sombre et acerbe de notre société de consommation, Blow job qui fut au final produit par Pietro Belpodio, un spécialiste du
hardcore, est quant à lui une vision plus métamophorique où tout semble échapper à la réalité. Truffé de références littéraires dont celles de Huxley à qui on doit un traité sur l'influence des drogues sur la perception des choses et Carlos Castenada, auteur des Portes de la perception, Blow job est ce qu'on peut appeler un film spirituel. Les effets des drogues sur nos sens et notre perception du monde est une des bases principales du film qu'on pourrait décrire également comme une sorte de voyage hors de notre corps afin de mieux percevoir la vie. Blow job baigne d'un bout à l'autre du métrage dans le désespoir à l'image de ses protagonistes, égarés, indifférents, vides, comme morts. "''Le monde est
fatigué, il touche à sa fin, les gens ont perdu l'envie de vivre''" déclare Sibilla alors que Stefano affirme n'avoir que des bulles dans la tête. Cela résume parfaitement l'ambiance du film. A l'instar de Blue movie, des voix-off particulièrement atones commentent sans cesse de manière volontairement stupide cette errance, cette détresse.
Sur de nombreux points, Blow job est une oeuvre fascinante, une énigme hypnotisante, étrange, par instant effrayante mais non dénuée d'humour, un humour noir proche du cynisme. Cavallone y a exprimé une fois encore toute sa philosophie, sa passion pour l'ésotérisme. Il y apparait plus mystique que jamais et Blow job pourrait bien être son film le
plus abouti malgré tous les défauts techniques et les erreurs de montage qui accentuent l'incohérence de certaines scènes. Tourné à l'emporte-pièce, Blow job souffre surtout de sa pauvreté budgétaire flagrante à la vision du film. Malgré cela, le film est tout de même plus maîtrisé que Blue movie techniquement parlant et surtout jamais ennuyant si on accroche un tant soit peu à l'univers du réalisateur.
Mêlant Cocteau (le motard à tête de mort) et Bunuel (la double personnalité de la sorcière), Blow job est une suite d'images, de sensations un peu comme l'était Spell même si à aucun moment le film n'atteint le paroxysme de ce dernier. Certaines séquences sont réellement
réussies, tout simplement superbes. La valse des vieillards tenant tous dans leurs mains une bougie, le bal masqué grotesque qui se reflète à l'infini dans les miroirs du salon, la scène où Sibilla après être sortie du miroir fait l'amour à Stefano ou encore la chevauchée du motard à tête de mort ne sont que quelques exemples pris ça et là. On peut aisément imaginer ce que cela aurait pu donner avec un peu plus de moyens. Quelques plans gore ou plutôt grand-guignolesques parsèment également le film et raviront les amateurs de sanguinolent même si les effets spéciaux sont assez basiques. Avec Blow job, Alberto
Cavallone clôt de façon élégante sa période surréaliste entamée avec le mystérieux et toujours invisible au jour d'aujourd'hui Maldoror qui fut suivi de Spell et Blue movie.
Pour l'anecdote le film fut tourné à dans une villa à Riolo qui appartenait à un comte octogénaire qui accepta de la louer pour quelques lires seulement du moment qu'il pouvait assister au tournage afin d'admirer les splendides corps nus des actrices!